Le Royaume Invisible
Poème pour les terres qui réveillent
Il est des pays que l’on visite.
Et puis il y a ceux que l’on traverse comme on traverse un feu.
Leur sol est ancien.
Leur souffle est vivant.
Ce royaume-là n’est pas une destination.
C’est une vibration.
Un seuil.
Un jugement.
Ici, le vent a de la mémoire.
La pierre écoute.
Les regards voient plus loin que les yeux.
Ce que tu portes en toi s’y manifeste.
Le beau, le brut, le brûlant.
Ici, rien ne se cache.
La lumière révèle. L’ombre consume.
Certains y trouvent leur guérison.
D’autres, leur dissolution.
Car ce n’est pas une terre que tu domines :
c’est une terre qui entre en toi, te retourne, t’éclaire ou te brise.
On ne pénètre pas ce royaume avec des masques.
Il faut y venir nu de mensonges.
Ou armé d’une vérité tranchante.
Car cette terre ne ment jamais.
Elle ne flatte pas. Elle révèle.
Ici, le silence te parle.
Le soleil t’interroge.
Les nuits s’ouvrent comme des gouffres constellés.
Les portes ne s’ouvrent qu’à ceux dont le feu intérieur est pur.
Mais à ceux qui viennent avec le cœur en désordre,
ce pays tend un miroir. Et ce miroir est sans pitié.
Car ce royaume n’offre rien.
Il restitue.
Il restitue exactement ce que tu es.
Et si tu n’es rien d’autre qu’un éclat,
alors il te fera briller.
Et si tu n’es que chaos,
il te laissera te consumer dans ta propre lumière.
